Ecoute le Rythme de ta Terre

Depuis la souche sur laquelle ils étaient assis, ils pouvaient contempler le champ en ruine.
Laissée stérile suite à des décennies de maltraitance, la terre sèche semblait se compacter comme l’enfant anticipe le prochain coup de la main qui se lève…

-Tu traites ton corps de la même façon que les hommes ont traité ce champ.

Apprêté dans son veston urbain, il restait silencieux. Ses chaussures savamment délavées recevaient l’effleurage d’un jean ajusté.

-Je ne comprends pas.

-Ton corps,…tu le pousses jour après jour à produire cette valeur.
Aujourd’hui tu l’arbores comme les pommes de ce champ autrefois luisaient à fleur d’étals et attiraient les chalands du marché.

Mais dans les entrepôts et dans les chambres froides de ta vie, il se déroule une toute autre histoire que celle que tu racontes avec tes vêtements.
Tu obliges ce corps, de réunions en métro, de voiture en bureau, de rendez-vous en sorties nocturnes…
As-tu seulement écouté son rythme une seule minute, vraiment ?

Je pense qu’il sait beaucoup mieux ce que tu veux que toi.
Ce corps t’enseigne la douceur du temps. Si tu y prêtes attention, il t’éloignera de cette culture intensive à laquelle tu penses devoir le contraindre.


Les violences que tu accumules le préparent à la rupture d’approvisionnement.

Le repli arrive toujours. Il est encore temps.

Ecoute le rythme de ta terre, sens ce corps.
Pose tes mains sur ce champ de bataille et demande toi où te mène cette lutte et si tu penses un jour pouvoir l’apaiser en continuant ainsi…

Il faut que l’eau ruisselle dans ces sillons, que les animaux puissent se rassurer entre les arbres.

La beauté se laisse bien plus être qu’elle ne se façonne.
Où cours-tu, la tête aussi remplie d’idées agronomiques ?
Laisse tomber les mains, écoute enfin le chant

Les yeux du vieil homme ne le transpercèrent pas comme ils eurent pu le faire.
Ainsi, sous la brume du soir, Matthieu pouvait laisser couler ses larmes librement.

©FJ Oct 2019

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