La pensée, la pensée.
Oui, je respire profondément.
Oublier les pensées, laisser passer les pensées.
Ouais…ça va bien 5 minutes. C’est une consigne facile à donner…
Sauf que, j’ai beau les laisser passer, les pensées ne passent pas.
Je suis là, prêt à laisser passer tout ce qui se présente. Les portes, barrières, fenêtres et toiles de tentes grande ouvertes pour laisser passer les pensées.
Mais, comme une blague lourde du beau frère plein de vin doux, comme une journée d’esclavage moderne, comme un discours de François Hollande, comme une grippe agrippée…Elles refusent de passer.
En troupeau indiscipliné, elles s’amassent et se cherchent, s’appellent les unes les autres…mais aucune ne sort de l’étable à moutons.
Les heures de méditations s’accumulent au portillon, les jours, les mois, les années. Je vous dis pas l’odeur…
Et puis, je prends de la hauteur et je vois l’étable pleine, j’entends les bêlements, le chaos des piétinements, les appels à la nourriture. Je vois tout ça d’en haut.
Depuis le chêne, au centre de la pâture, depuis le ciel d’été ou le nuage de pluie, j’observe la situation d’engorgement et je comprends soudain.
Les bêtes ne peuvent pas sortir, il manque un bout d’elles-mêmes.
Soudain, l’une d’entre elle, peut-être plus téméraire, lève le menton et hume un peu plus loin. Elle sent l’herbe douce et aperçoit déjà, entre deux paires pies, un carré de ciel bleu.
Une raison de sortir, de quoi la motiver.
Un manteau de verdure, un air frais, un vent doux. L’appel de la prairie.
Les bêtes pour la prairie, la prairie pour les bêtes.
Les pensées sont incomplètes et ne reflètent qu’une seule part de leur matérialité pour l’œil inexercé. Mais, comme une pièce de monnaie à un seul coté, elles sont une illusion. Alors elle cogitent et s’agitent sans raison.
Les pensées ne passent pas le pas de porte étroit. Il faut parfois enlever un mur, ôter un toit. Ou carrément sortir et regarder ailleurs. Ailleurs? Je ne suis donc pas contraint à respirer l’air vicié de l’étable bondée?
Et moi qui m’y pensait lié pour l’éternité…
L’autre partie de ce puzzle enfantin n’est pourtant pas bien loin. Une coudée plus bas se situe leur support.
Bêtement, nous scrutons le cerveau et demandons pourquoi les pensées ne passent pas.
Dans le tronc, au milieu de poitrine, attend le vent des émotions.
Les deux moitiés unies, émotion-pensée (ou ‘corps-esprit’ peut être?) elles peuvent virevolter, emprunter la fenêtre ouverte de la respiration et voler où bon leur semblera.
Les émotions sont le corps des pensées qui jouent en nous et se jouent de nous.
Tant que nous ne nous sommes pas connectés à ce corps-support, elles continueront de piétiner dans notre étable.
En lâchant le cerveau, en trouvant l’émotion, nous pouvons, sans la juger, la laisser circuler, grandir ou s’en aller, l’accepter et la voir à son tour nous quitter, chevauchée de sa pensée cavalière.
En trouvant le corps émotionnel du psychique, nous accédons soudain à la poignée de porte que l’on cherchait en vain du mauvais coté du mur.
De là, nous ne sommes plus qu’à un pas de pouvoir observer le corps physique du corps émotionnel.
Tout est là. A portée de souffle.
En respirant, je tiens entre mes doigt de conscience, le collier où s’enfilent les perles du corps, des émotions et des pensées. L’ensemble, remis en ordre de marche souple, circule à nouveau.
La pensée- l’émotion.
L’émotion- le corps.
Le cérebrocentrisme est un géocentrisme, ou un héliocentrisme en nous.
Dire que l’on croyait l’univers limité au système solaire…
Chacun de ces sauts quantiques nous fait passer subitement, sans le prévoir, d’un orbite à l’autre de notre cosmos intérieur.
Franck – https://www.ecouterlesilence.com/blog
