Lorsque le crayon de bois est si petit
Qu’il s’apprête à disparaître au prochain tour de taille :
Où donc est passée toute sa longueur perdue ?
Est-il vrai qu’elle n’est plus ?
Elle s’en est allée remplir
Les exercices et les cahiers,
Les feuilles volantes et les listes
Elle a vidé les pleurs,
Et sa mine à rempli les cœurs
Il suffirait qu’on ait porté un peu de soin
Aux supports de ses poussières de bois
Pour les retrouver encore
Photographie de bois
Xylographie de lumière
Dans tous les cas, d’ici mille ans,
Le papier même aura fondu
En miettes craquelées
De papyrus envolés
Sa mine d’antan aura-t-elle disparue pour autant ?
Disséminée aux quatre vents,
Il n’en restera plus personne
Pour lui reconnaître l’identité.
Un bout de bois,
Une terre sèche,
Une tige de maïs
Et quelques cendres dans l’océan
Personne pour savoir que tous ces éléments étaient
Le bout de crayon qu’entre tes mains tu tenais.
Dans ce crayon, qui devinait d’ailleurs
Les bouts des autres qui cherchaient
A se reconnaître sous tes traits.
Dix mille âmes déjà écrivaient au travers
Des miettes que tu cherches aujourd’hui.
Tu les ignorais toutes, ne pensant qu’à ta mine
Celui que tu perds est déjà celui
Que les autres ont perdu.
Celui qui se perd n’étant pas
Peut-il être perdu ?
La mort est aussi illusoire que la disparition
D’un reste de crayon de bois.
Il n’a jamais été, donc il ne meurt pas.
Qu’il n’ait jamais été cela,
Est-ce à dire qu’il n’ait jamais été ?
Tout cela, les dix mille crayons, c’était lui
Et les dix mille visages
Qui s’exprime dans le trait,
Ce sont toi, ce sont eux.
Chacun d’eux, tous à la fois.
Franck Joseph
Text /photo ©FJ March 2021
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