Voilà trois heures que je me tais.
Bien sûr, ça plaît à tout le monde, avant de les irriter, de piquer leur curiosité.
Ça commence comme un jeu: « Juste se taire ».
Ça continue comme un art: « Se taire justement ».
Puis ça devient une évidence: « Justement, se taire ».
Se taire n’est pas une action, une énième chose à faire.
C’est arrêter de parler. Tout simplement.
Là où ça se gâte, c’est quand il s’agit de maintenir cet arrêt, de continuer d’arrêter de parler.
On observe les gens, les événements et les pensées et on sent d’irrépressibles impulsions de parler. Ce qui reste de jeu, à cet instant nous permet d’en prendre conscience. Quelles sont ces giclées d’énergies qui font subitement surface et cherchent à se projeter au dehors de nous vers le monde?
On les observe, on s’aperçoit progressivement qu’elles ne servent à rien. Elles n’ajoutent rien à la situation sous nos yeux.
A ce stade, nous franchissons un zone de turbulences, puisque apparaît l’occasion de douter de nous. Si ces éruptions de mots ne servent à rien? A quoi servons-nous, nous qui les prononçons? Elles redoublent alors d’intensité nous entraînant dans l’urgence d’une parole…
….urgence qui passe
Les prochains assauts deviennent sursauts, soubresauts, ondes puis calme plat.
Nous pouvons commencer à nous taire justement. La distance qui naît entre nous et notre activité cognitivo-énergétique intime nous ouvrent les portes de la salle au trésor, d’où nous verrons les autres parler, et saurons reconnaître en nous et accueillir l’écho de leurs pensées-mots.
Leur chancellements, hésitations, inconstances, incohérences, peurs du vide, peurs de disparaître en ne parlant plus, leur propension à se répandre, à médire, à se dire maladroitement, à vouloir absolument mettre un empreinte (sonore) sur leur environnement, à s’entremêler dans des centaines d’interactions inutiles, qu’il conviendra de détricoter, à réagir, toujours réagir, sans tampon à ce qui provoque, à nourrir les pensées desquelles couleront des mots puis des paroles, à créer une occasion de conflit, qui n’aurait pas fait surface se seraient-ils tus…
De cette conscience intérieure se déploieront mille constats qu’il nous appartiendra de faire nôtres, instantanément si notre déficit de paix est vertigineux, ou avec le temps, en renouvelant l’expérience.
Nous pouvons dès lors, comme une conclusion, justement, nous taire, sachant au fond de nous que:
-Ce monde de l’hyper communication est un leurre, factice et épuisant;
-La perspective offerte par le silence crée le calme infini, où rien ne dépasse l’absence de mots,
-Développer l’intériorité c’est accroître notre disponibilité, notre présence réelle au monde réel, et non plus notre besoin d’exister dans le monde que nous peignons de mots.
-Nous sommes plus perméables aux messages métalinguistiques, au delà du langage et des mots
Se taire, c’est mettre l’autre face à son bruit.
Accéder au silence, entrer dans la Terre du Silence, c’est trouver la solitude parmi les gens. C’est la retraite dans le monde.
Vous faîtes quoi pendant les trois prochaines heures?
Franck
J’ai aimé ce texte…
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Bonjour,
Merci pour vos lecture et votre retour.
Franck
https://mindfulair.wordpress.com/
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Il m’a fait plaisir de faire lecture chez-vous.
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Cela pourrait s’écrire
de façon aussi vraie
et raisonnable
le cri du je
au fond de son puits.
mais il ne trouve naturellement
que l’écho de l’eau
ou de la salive
qui le brûle.
merci pour ce rappel au silence
et à la retenue
à la bonté sincère
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oui…le cri du je
C’est très intéressant de l’entendre hurler en silence…
Il arrive que ce soit même attendrissant, lorsque l’on perçoit les motifs de son urgence à se dire.
bonne journée à vous,
A bientôt
f
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Dans cette déroute du monde dans lequel nous sommes plongés et où nous avons mis nos enfants, face à l’incertitude des lendemains, ou aux choses trop sinistrées, il faut bien s’exprimer, viser juste, dire là où sont les maux, puis quand on est violemment attaqué par ces esprits obscurs réfractaires, nous n’avons plus que le silence, effectivement à opposer au leur.
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