A celle qui préférait le parquet aux sols d’herbe et de terre.
Il est quand même dommage de vivre sa vie pour essayer de se dire plutôt que de vivre sa vie pour vivre sa vie.
Ta tristesse, personne ne la voit.
A ton entrée, tous ne pensent qu’à se protéger contre les plans de conquête, si peu subtils, que tu déploies.
Ce n’est pas que tu manques de finesse pour parvenir à tes fins. Cette brutalité dans le déroulement des étapes vers le contrôle révèle en réalité, non pas la rigueur ou la robustesse de ton âme, mais l’urgence qui t’anime.
Ici encore, une urgence à te dire.
Cette force que ton champ de perception ignore est si puissante qu’elle rend la prise en compte des sensibilités de ceux qui t’entourent impossible tant celle-ci impliquerait écoute, patience et compassion.
Tant celle-ci impliquerait de conscience…
Parce que je me trouve sur ton chemin, tu me perçois en ennemi.
Ce n’est pas parce que je me trouve sur ton chemin que je suis ton ennemi.
Ta lecture de notre territoire partagé est ici défaillante. Celle que tu cherches à nourrir en te goinfrant du paysage et de ses habitants est précisément celle qui te réduit en esclavage depuis si longtemps.
Ta bouche proclame pourtant la quête de la liberté, celle qu’on arrache à prix de sang.
J’aimerais que tu y voies mieux. Laisse retomber les poussières qui rougissent tes yeux de colère. A l’étal où tu te présentes pour y faire tien chacun des articles exposés, regarde mieux : il n’y a personne pour négocier.
Aussi, vas-y, sers-toi.
N’attends pas de ma part que j’élabore une quelconque contre-stratégie pour retarder ton ascension. Je ne la souhaite pas plus que je ne souhaite m’y opposer.
-Je ne peux la souhaiter : non seulement celle-ci serait une expérience douloureuse pour moi, car ton mal être, ta tension ne peuvent manquer de rejaillir sur ceux qui t’entourent…Par ailleurs, pour ce qui est de ton bonheur, ta mise en mouvement ne pourra jamais te mener à une quelconque satisfaction. Le système où nous nous démenons est supporté par les mêmes câbles que ceux que tu arpentes. Où cela nous a-t-il tous menés ?
-Je ne peux m’y opposer : je ne ferais alors que nourrir ta machine à frustration, ce qui aura pour effet de te rendre encore plus vorace, encore moins subtile.
Et je n’ai plus les épaules ni le cœur pour porter le ciment des autres…Désormais, je préfère attendre qu’il se réduise en sable avant que le vent et la mer ne l’emporte.
A toi qui pars à l’assaut des autres, j’aimerais te faire savoir que je ne t’en veux pas. Je te laisse agir et souhaite ton bonheur, par-delà les montagnes que tu t’acharnes à gravir.
J’aimerais te le dire, mais je ne le peux pas. S’il s’agissait de dire pour être entendu…
Dans mon silence, pourtant, j’entends ta fougue à parler de toi.
Dans ce silence que tu ne saurais pénétrer pour l’instant, je t’écoute.
Tous cet espace que tu brasses n’est rien en regard de ce que tous, nous t’offrons comme espace pour accueillir, et perdre, ce que tu veux nous dire.
Franck Joseph
Poèmes, recueils, articles et romans disponibles en format papier : LIVRES ET RECUEILS
Merci …
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