Voici une courte note inspirée ce matin par Caroline, partenaire de Zazen.
Quelle place faut-il donner à la rigueur ?
Je ne suis pas connu pour refléter les vertus de détermination et de rigueur,
Et bien des éléments de ma personnalité tiennent davantage du papillonage, de l’effleurement que de l’intention obstinée ou de la profondeur d’assimilation.
En surface, du moins
Pour tromper l’ennemi, peut-être.
L’ennemi intérieur, plus certainement.
Ne pas se percevoir comme rigoureux est un excellent moyen de ne pas s’épuiser en appliquant la rigueur nécessaire à l’accomplissement sérieux de la tâche.
Et quand il en vient de fonctionner en tunnel d’attention, il n’est rien qui puisse me faire dévier ou sortir de ce tunnel, si ce n’est : tomber, littéralement, de fatigue.
Cela s’applique volontiers à des domaines diverses tels que la pratique musicale, la formation à un domaine, à plusieurs domaines en même temps.
Mais qu’en est-il de la place faite à la rigueur dans la pratique spirituelle ?
Voilà aussi une cause de l’adéquation, la rencontre entre Zazen et ce corps, initialement.
Cette combinaison de douceur et de force,
Cet appel d’un esprit de determination, ce tunnel d’assise.
Main de fer, gant de velours,
Assise brute, cœur délicat
Cadre de pratique, liberté ultime.
La détermination, la rigueur, pour pénétrer le libre, l’indéterminé.
Devenir libre par la contrainte,
S’émanciper par la discipline.
Je pense ici aux vœux :
-de silence (pour communiquer en vérité)
-de pauvreté (pour la richesse du cœur)
-de chasteté (pour l’abondance authentique)
-d’obéissance…
De prime abord, cela apparaît très conradictoire, contre-intuitif,
aux antipodes de notre monde hyper-post moderne.
Pour trouver la liberté il faut un territoire à quitter.
Avant d’entrer en Terre Promise, le peuple d’Egypte est esclave.
Ce peuple est intérieur.
Pour pouvoir briser le cadre (être libre)…il faut un cadre à briser.
Beaucoup de pratiques se revendiquent d’une absence de cadre.
Ce positionnement, s’il n’est pas le fruit de l’ignorance, est particulièrement habile,
car il offre aux âmes broyées par un enchevêtrement de cadre (culturels, familial, professionnel, sociétal) une apparence d’alternative, d’aire de repos. (« Ici, enfin, je me sens libre »).
Nous pourrions brièvement parler le l’illusion de libération propre à la société.
Cette libération est illusoire. En réalité, il s’agit d’une contrainte renforcée, par voie d’identification, de sollicitation psychique permanente (obligation constante de se positionner, de se réaffirmer en tant que ceci ou cela)…Ce qui relève bien plus de l’enfer(mement) que de la libérté.
L’illusion de libération comme enfermement au carré.
La présence de cadre initial, le maintien rigoureux de ce cadre recèle une véritable opportunité d’en sortir.
D’en sortir vraiment, non pas par une sortie idéologique, verbale.
Celui qui est libre n’a nul besoin de le clamer sans cesse.
Aussi, celui qui hurle sa liberté en permanence, de quel enfermement parle-t-il vraiment ?
Revenons :
Dans la pratique spirituelle, cette absence de cadre est en réalité absence de cadre à briser,
N’ayant pas de cadre à briser, il m’est impossible de sortir.
L’univers dont je ne peux m’extraire est, à proprement parler, une prison.
Puis, comprendre qu’il n’y a jamais eu de cadre autre que celui auquel nous croyions alors.
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