Et L’Otage Se Libère

Les éclats de colère prennent les acteurs en otage.
Confrontés au cris, aux gesticulations saccadées, ils sont victimes d’un ‘emotional freeze’, une torpeur émotionnelle qui pétrifie.
Seule la descente en intériorité, effectuée par l’auteur de la colère pourra les libérer, les rendre au mouvement.

Ce dernier est-il vraiment l’auteur de sa colère ?
Même s’il exprime parfois un raffinement de bourreau dans l’expression de celle-ci, il est lui-même l’objet de mécanismes des structures qui le ceignent.

Dans une des formes les plus subtiles que cette colère puisse prendre, il maintient un état intérieur de potentiel explosif. Ce n’est pas le calme, ni vraiment la tempête.
Mais ceux qui pratiquent un individu au quotidien voient dans les remous du calme qui s’éloigne les tempêtes destructrices qui fulminent.

Par l’historique du groupe (famille…) ils sont conditionnés à cette anti-récompense et comme chacun lève la patte pour obtenir les croquettes, ils se restreignent, se brident, apaisent, s’exécutent et se plient en connaissance des conséquence destructrices des hurlements et autres balafres au réel qui peuvent advenir.

L’éducation est si parfaite qu’il ne s’agit souvent que de quelques réactions symboliques chez l’auteur à la colère pour pétrifier et soumettre l’ensemble des acteurs.
Ici encore, il y a peu de conscience de part et d’autre, mais les jeux de répétition de conditionnement confèrent à ce processus une efficacité redoutable…

Je pense que l’auteur est souvent bien plus profondément pris au piège que les acteurs.
Un surplus temporaire de décalage, d’observation, une habitude progressive à disposer son être en fonction des vents permet aux voiles intérieures de nous mener de l’état d’acteur à l’état de spectateur.

Nous pouvons alors nous interroger sur les entrelacs de l’emprise : la nôtre d’abord, puis celle du colérique ensuite, lorsque nous serons libérés.

Il est même à parier qu’une fois sorti de ce jeu morbide, l’autre cesse de nous attribuer un rôle, comme on ne distribue pas de rôle à de mauvais acteurs.
Cela initie chez lui une prise de conscience à moins qu’il ne cherche à transformer cette emprise sur d’autres terrains plus fertiles (sphère professionnelle, colère contre soi…)

Cela demande de la part du libérateur un foi ferme dans les révélations de son observation, ainsi qu’un esprit d’investigation aiguisé, une défiance adolescente, la force du demi-sourire,
la conviction de l’enfant dans ses jeux d’explorateur, la foi dans l’autrement, le courage de la défiance, la quête, l’aventure ultime.

Cela, tout cela est l’esprit d’éveil, rien de moins.
Il libérera l’un et enseignera l’autre.

©FJ April 2022
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(Publications et Pratique)
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