L’Idée Folle De L’Enfant-Roi

Contexte : Octobre 2020 : Emmanuel Macron, lors d’un discours visant à condamner toute forme de séparatisme, déclare vouloir interdire l’instruction en famille à la rentrée 2021.
Un projet de loi est en cours d’examen et prévoit que « l’école à la maison » fasse désormais l’objet d’une autorisation, accordée par l’Education Nationale, dans un cadre très précis.

Cette conception met fin à la liberté d’enseignement.


« Mais qui a eu cette idée folle, un jour… d’inverser les rôles ? »

Alors que pendant plus d’un siècle les parents confiaient leurs enfants à l’Ecole,
Celle-ci était alors l’organe de sous-traitance de l’instruction, le récipiendaire d’un noble mandat parental, en charge d’honorer la mission qui lui a été confiée.

Voici désormais qu’elle revêt le kimono à l’effigie présidentielle et se retrouve, grossier judoka, à plaquer au sol quelques dizaines de milliers de familles, expliquant lourdement aux parents stupéfaits, et dans le brouhaha du dojo républicain, qu’elle détient les enfants, et que ces parents se montrent disciplinés et suffisamment obséquieux, elle leur prêtera ces derniers afin qu’ils les nourrissent et se trouvent, au passage, une raison à leur existence grisâtre de travailleurs.

L’école leur confiera le mandat suivant : respecter ses injonctions idéologiques et faire évoluer les petiots de la nation dans le sens des valeurs…vers lesquelles elle aura préalablement décidé qu’il fallait s’orienter…
Si, par malheur, ces parents se piquent d’une volonté de penser par eux-mêmes et de définir le sens et les valeurs, s’il s’avère qu’ils montrent l’outrecuidance du non-alignement sur la ligne officielle, alors l’école arguera du plus grand bien et, préalablement à la sanction, instruira les parents.

Voilà le grand retournement : l’instruction en famille, l’école à la maison, c’est fini.
C’est fini, parce que c’est Macron qui l’a dit.

Avec la bienveillance pour seul guide, notre président ose dire…. « Nos Enfants »…
Ce faisant, il s’invite dans la relation parentale.
Dans ce monde nouveau, les parents sont composés de deux personnes + le président.
Cela, en dépit de toute l’ouverture d’esprit dont je suis par ailleurs capable, me pose problème.

Dans sa pensée de Père Universel, l’instruction à l’école devient obligatoire et toute volonté d’instruire son enfant en famille pour une raison autre que celle préparée par les cases étroites du système (itinérance, situation de handicap), deviendra impossible.

Les parents devront alors demander l’autorisation pour garder leurs enfants.
Reformulons, clarifions :
L’institution républicaine consentira à bien vouloir préter les enfants aux adultes dont ils sont biologiquement issus.

Dès lors, à bout portant, la République abat les projets d’éducation alternative.
Elle nomme cela « péché de séparatisme ».

Cela ne grandit pas la République. Elle devient si étroite qu’elle n’est plus en mesure d’intégrer la différence. La vraie. Non pas ces différences de surface artificiellement excitées pour souligner sa propre gloire.
La « pensée » différente, toute pensée réelle apte à proposer, encourager un autrement.
La force vive, en réalité, du modèle républicain agonise.
Est déjà morte.

Qu’est que cela dit d’une relation amoureuse lorsque l’amour est un impératif.
Comment pourrais-je encore aimer ma femme si elle me menace de mort en cas de séparation ?

L’injonction d’adhésion au Tout-Républicain n’est pas républicaine.
La grandeur des pages du cahier républicain est de savoir aménager les marges, d’y protéger les enfants, de faire en sorte que derrière les lignes verticales, ils préparent le renouveau, le différent, le non-monolithique qui faisait la beauté de ses traits.

Aujourd’hui enlaidie par cette appropriation folle – cette prise en otage des enfants.
« Nos Enfants » pour « NOTRE PROJET » (ici le gras des caractères tend à restituer toute l’hystérie — et la violence — du hurlement originel).
Cette prise de judo arrive par surprise sur le passant joyeux, qui ne demandait rien à personne.

Par ce braquage des familles – aucune n’a réclamé le combat, elles se retrouvent pourtant aujourd’hui étouffées par un molosse dans un dojo décati, les yeux rivés sur l’arbitrage parlementaire.

Dans les gradins, les voix des enfants pour qui l’école est une souffrance inutile, une contention sadique, implorent.

La foi qu’ils ont dans la capacité des parents à les protéger encore déchire le cœur.
Rien n’y fait. Les enceintes hurlantes crache l’onction de bienveillance: « C’est pour votre bien, protegeons nos enfants ».
« PARCE QUE C’EST NOTRE PROJET !! ».

Infâme démonstration circulaire de l’enfant-roi.


©FJ Juin 2021

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